Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Du côté de Clio

Mon amie Victoria

23 Janvier 2015, 20:54pm

Mon amie Victoria

Un film sur le racisme ordinaire.....et pourtant occulté.

Mon amie Victoria, de Jean-Paul Civeyrac (2014)

Avec Guslagie Malanda, Nadia Moussa, Pierre Andrau...

Victoria a 8 ans, va à l'école, et sa tante avec qui elle vit fait un malaise et doit rester quelques jours à l'hôpital. Le frère d'un de ses amis, Edouard, vient la chercher pour qu'elle passe la nuit chez eux. Quand il la voit dans la cour de l'école, il part, il ne savait pas qu'elle était "noire". Victoria, une fois arrivée dans l'appartement, va découvrir un monde qu'elle n'avait jamais imaginé, un monde riche, qui l'a poursuivra toute sa vie, même bien des années plus tard, car elle continuera à passer devant ces appartements, en se souvenant d'un rêve inaccessible.

J'ai adoré ce film, clairement et simplement. Il est beau, profond, intelligent, en non dits, les acteurs sont excellents. Et il est surtout révoltant, mais en douceur. Il n'y a jamais de violence montrée à l'écran, elle est subjective. Une famille de gauche recueille une jeune fille noire et se vante de la garder une nuit chez eux ; mais Edouard, le fils aîné qui après travaillera pour aider "les pauvres noirs du Sahel", demandera un test ADN pour être sûr que l'enfant né d'une relation entre Victoria et son frère est bien de lui, hein, parce que bon, il ne faudra pas qu'elle veuille profiter de la situation pour soutirer de l'argent quoi. Et la mère qui dit qu'elle a "toujours rêvé d'avoir une petite-fille noire, mais café au lait c'est bien aussi". Révoltant. En même temps, c'est un film sur l'amour : Victoria ne cessera de le chercher, encore et toujours, elle qui a vécu avec sa tante et qui enchaînera tous les malheurs que l'on ne souhaite à personne. Elle fera des choix extrêmes pour tenter d'aider sa fille, pour qu'elle ne reproduise pas ce qu'elle a accompli. Cette figure de femme passive, mais pourtant active et totalement lucide, toujours à la recherche de sa place dans le monde, toujours ancrée derrière un visage froid, m'a profondément touchée. Et cette ambivalence, de racisme - non racisme, aussi.

Le film est très bien tourné, les plans sont soignés, l'idée d'une voix off omnisciente pour capter et raconter les pensées profondes des personnages que l'on ne peut pas toujours déceler est très bonne. Peut-être que le temps s'écoule un peu vite : on suit la vie de Victoria de ses 8 ans à la trentaine, dans 1h40 de film. Mais c'est pardonné !

Un film tout simplement magnifique.

Commenter cet article